Réforme de l’impôt des sociétés

Réforme de l’impôt des sociétés: la règle des 45.000 euros.

Question orale posée le 21 février 2018 au Ministre des Finances, Chargé de la Lutte contre la Fraude Fiscale, sur « la réforme de l’impôt des sociétés et la règle des 45.000 euros ».

Monsieur le Ministre, récemment, dans les colonnes de La Libre, vous avez apporté une précision importante à propos de la règle des 45 000 euros, qui préoccupe de nombreux dirigeants de PME. En effet, le tissu économique de la Belgique est constitué de très nombreuses PME qui pourraient se voir fragilisées par une application trop brutale de cette règle.

Cette mesure précise donc que la rémunération minimale à accorder à au moins un dirigeant d’entreprise passe de 36 000 à 45 000 euros mais que si cette rémunération s’avère inférieure à ce montant, il est admis qu’elle soit seulement égale au minimum au résultat imposable de la société. Vous indiquez dans la presse que la règle des 50/50 n’a pas été modifiée et qu’il suffit que la rémunération minimale soit égale à la moitié du bénéfice de l’entreprise. À titre d’exemple, vous prenez alors le cas suivant: « Une entreprise qui dégage des profits de 50 000 euros pourra continuer à rémunérer son dirigeant à hauteur de 25 000 euros tout en bénéficiant du taux réduit. »

Cette déclaration n’a pas manqué de soulever de très nombreuses interrogations de la part de professionnels du chiffre, en particulier de l’Ordre des Experts-Comptables et des Comptables Brevetés de Belgique.

Monsieur le Ministre, quelle définition donnez-vous du « bénéfice » ou « profit » de l’entreprise? S’agit-il de la base imposable déterminée après les ajouts de D.N.A. et les déductions extra-comptables? S’agit-il du bénéfice comptable? S’agit-il du bénéfice comptable ou de la base imposable préalablement diminués de la rémunération du dirigeant?

Il est évident que toutes ces règles influencent fondamentalement les 50/50 sur les définitions données.

Monsieur le Ministre, pour vider toute interprétation éventuelle, pouvez-vous confirmer que le taux réduit s’applique bien dans deux cas de figure que je prends en exemple? Ainsi, une société qui a une base imposable de 75 000 euros ne doit pas attribuer 45 000 euros à son dirigeant pour conserver son droit au taux réduit mais elle peut se limiter à lui verser une rémunération de 37 500 euros. De même, une société qui a une base imposable de 26 000 euros et qui a attribué une rémunération de 20 000 euros à son dirigeant ne sera jamais pénalisée par la perte du taux réduit.

Je vous remercie, monsieur le Ministre, de bien vouloir donner une petite précision ou une définition qui permettra de vider toutes les interprétations susceptibles de générer pas mal de gesticulations dans les prochains mois.

Johan Van Overtveldt, Ministre:

Monsieur Scourneau, la nouvelle disposition qui prévoit une rémunération minimale de dirigeant d’entreprise augmentée à 45 000 euros n’a rien changé à la manière dont doit s’apprécier cette rémunération minimale au regard du résultat de la période imposable. Par résultat de la période imposable, il faut entendre, comme précisé dans les documents parlementaires, le montant sur lequel est calculé l’impôt des sociétés après application des différentes déductions. En d’autres termes, la base imposable de la société à laquelle doit être comparée la rémunération de dirigeant d’entreprise tient déjà compte de la prise en charge de cette dernière. Autrement dit, il importe dans la pratique de partir du résultat imposable de la société avant déduction de la rémunération du dirigeant d’entreprise pour être en mesure de vérifier quelle est la rémunération minimale requise.

Concrètement, deux situations peuvent alors survenir. Première possibilité, soit le résultat imposable de la société avant déduction de la rémunération s’élève à 90 000 euros ou plus et dans ce cas-là, la rémunération minimale doit être de 45 000 euros.

Deuxième possibilité: le résultat imposable de la société avant déduction de la rémunération s’élève à moins de 90 000 euros. La rémunération minimale à verser doit être au moins égale à 50 % du résultat imposable avant déduction de la rémunération. La rémunération accordée est ainsi égale au résultat imposable après déduction de la rémunération.

Appliqué aux trois exemples que vous citez, cela donne ce qui suit. Premièrement, le résultat imposable de la société s’élève à 75 000 euros, étant entendu qu’elle n’a pas encore versé de rémunération. Quelle rémunération doit-elle verser afin de pouvoir bénéficier du taux réduit? La rémunération doit être d’au moins 37 500 euros. Après déduction de cette rémunération, le résultat imposable de la société s’élève en effet au même montant: 37 500 euros. La condition est, en l’occurrence, remplie.

Deuxièmement, si le résultat imposable de la société s’élève à 75 000 euros après déduction d’une rémunération de 37 500 euros, la société est exclue du taux réduit. En effet, le résultat imposable de la société avant déduction de la rémunération est alors égal à 112 500 euros. La rémunération minimale requise est alors toujours égale à 45 000 euros, ce qui est le maximum en général, peu importe le niveau de profit supérieur à 90 000 euros.

Troisièmement, une société dont le résultat imposable est de 26 000 euros, après déduction d’une rémunération de 20 000 euros, est également exclue du taux réduit. Pourquoi? Parce que le résultat imposable avant cette déduction s’élève à 46 000 euros. La rémunération minimale requise est alors égale à 50 % de ce montant, soit 23 000 euros. Après déduction de cette rémunération, le résultat imposable s’élèvera aussi à 23 000 euros.

En d’autres termes, dans le cas que vous citez, la société aurait dû verser 300 000 euros, non, 3 000 euros de rémunération supplémentaire pour bénéficier du taux réduit.

Vincent Scourneau (MR): J’espère que votre réponse videra de leur sens toutes les interprétations erronées et que la règle sera clairement comprise.

 

Johan Van Overtveldt, Ministre: J’ai fait tout mon possible pour expliquer cette réforme en Wallonie.

Vincent Scourneau (MR): Mais c’est parfait!

Johan Van Overtveldt, Ministre: Évidemment, quand on comprend le raisonnement dans sa totalité, cela devient clair. Pas mal de gens émettent cependant des doutes – ce que je comprends.

Vincent Scourneau (MR): Oui, bien sûr, et c’est très légitime. Je vous remercie beaucoup, monsieur le Ministre.