Honoraires des administrateurs des biens de la personne

Question 0589 posée à la Ministre des Pensions et de l’Intégration sociale, chargée des Personnes handicapées, de la Lutte contre la pauvreté et de Beliris concernant la problématique vécue par le juge de paix de Braine-l’Alleud face aux multiples refus des avocats potentiels administrateurs de biens et de la personne pour les citoyens au faible patrimoine.

La loi organique des CPAS énonce en son article 1 que toute personne a droit à l’aide sociale, qui a pour but de permettre à une personne de mener une vie conforme à la dignité humaine et qui est un droit attaché à la personne. La prise en charge des frais et honoraires des administrateurs de biens et de la personne ont été consacrés par la jurisprudence comme étant des frais relevant de la dignité humaine et pouvant donc faire l’objet d’une prise en charge par les CPAS au titre d’aide sociale. Une difficulté majeure se présente en ce qui concerne la dernière facture émise par l’administrateur de biens et de la personne. En effet, celle-ci intervient fréquemment après le décès de la personne protégée. Le tribunal du travail de Nivelles a, par un jugement du 28 juin 2022 frappé d’appel devant la cour du travail de Bruxelles, considéré que l’administrateur ne pouvait pas contraindre le CPAS à prendre en charge le solde de ses frais et honoraires après le décès de la personne protégée. En cela le tribunal du travail de Nivelles s’aligne à la jurisprudence actuelle: la cour du travail de Liège (22 octobre 2021, RG 2021/AL/152) a jugé que « le droit à l’aide sociale, qui a pour but de permettre à une personne de mener une vie conforme à la dignité humaine, est un droit attaché à la personne. Seule la personne dont la dignité humaine est protégée a droit à cette aide et peut prétendre à l’intervention du CPAS à son profit dans le cadre de la loi du 8 juillet 1976. Ses créanciers ne peuvent exercer une action oblique sur pied de l’article 1166 du Code civil en vue d’obtenir cette aide ». La cour du travail de Mons (5 juin 2019, 7e chambre, RG 2018/AM/116), quant à elle, précise que « l’action introduite par un administrateur provisoire en vue d’octroyer à ce dernier une aide sociale destinée à couvrir ses frais et honoraires de l’administrateur provisoire n’était pas recevable. (…) Ce qui précède indique que l’administrateur provisoire n’avait, en l’espèce et en fonction de l’objet concert de sa demande, ni intérêt ni qualité pour agir. » Le juge de paix de Braine-l’Alleud se retrouve aujourd’hui en difficulté: il essuie nombre de refus des avocats – potentiels administrateurs de biens et de la personne – lorsqu’il envisage de les désigner pour des personnes avec un très faible patrimoine. Ceux-ci craignent en effet de ne pas être payés pour leurs derniers devoirs. Cette situation est inextricable et sollicite de la part du législateur une réflexion profonde quant au mode de rémunération des administrateurs des biens et de la personne. Lorsqu’il s’agit d’un professionnel qui agit comme « officier de justice », un système de prise en charge pourrait être mis en place à l’instar du fonds de surendettement dans la matière du règlement collectif de dettes ou entrer sous la coupole de l’aide juridique de deuxième ligne. Dans votre réponse à ma question n° 140 du 13 avril 2021 (Questions et Réponses, Chambre, 2021-2022, n° 50) sur le même sujet, vous avez précisé n’être pas pleinement compétente et devoir solliciter votre collègue en charge de la Justice tout en mentionnant votre motivation « à mobiliser les acteurs concernés afin que la problématique soit clairement objectivée et que des propositions concrètes soient soumises à mon collègue ministre de la Justice ».

1. Quelle est votre position par rapport à l’éventuelle prise en charge par le CPAS de la dernière facture émise par l’administrateur? Rejoignez-vous la jurisprudence?

2. Êtes-vous au courant de problèmes semblables dans d’autres cantons de justice de paix?

3. Me rejoignez-vous sur un système de prise en charge, à l’instar de l’aide juridique de deuxième ligne?

4. Des propositions ont-elles déjà été transmises au ministre de la Justice? Si tel est le cas, lesquelles? Si tel n’est pas le cas, pourquoi?

Une réponse a été publiée le 26 juin 2023.

La mission du CPAS a pour objectif de permettre à chacun de mener une vie conforme à la dignité humaine. Si suite à l’enquête sociale, il apparait qu’un administrateur de biens est nécessaire pour permettre à la personne de mener une vie conforme à la dignité humaine, le CPAS peut prendre en charge les frais et honoraires de l’administrateur de biens. Néanmoins, il est nécessaire que le CPAS puisse, d’une part, faire son enquête sociale en vue de déterminer l’état de besoin de la personne et, d’autre part, le CPAS n’a pas vocation à prendre en charge les dettes des personnes décédées, au motif que la succession ne permet pas de prendre en charge celles-ci. Dans le cas p. ex. de la décision de la cour du travail de Liège, le CPAS n’aidait pas la personne pendant la période concernée. Je vous rejoins quant à la nécessité de réfléchir sur la procédure concernant l’administration provisoire de biens, pas uniquement sur le mode de rémunération des administrateurs des biens mais également sur le suivi apporté par ses administrateurs de biens vis-à-vis des personnes aidées. Lorsque dans l’arrêt de la cour de travail de Mons, il apparait qu’une partie des avoirs de la personne était consacrée à ses 13 chats, il me semble qu’il est important que cette administration de biens soit liée à un suivi social qu’un avocat n’est pas en mesure de mettre en place. C’est en vue de favoriser ce dialogue que ce point est repris dans le quatrième plan fédéral de lutte contre la pauvreté. Je ne suis pas au courant des difficultés que rencontrent les juges de paix concernant la nomination d’administrateur de biens. Toutefois, il me semble que si problématique il y a, celle-ci ne résulte pas principalement de la prise en charge par les CPAS. En effet, la plupart des avocats prélèvent chaque mois une provision d’honoraires sur les avoirs de la personne et ce y compris sur l’aide sociale ou le revenu d’intégration. Je laisse donc à mon confrère, ministre de la Justice, vous répondre sur cette question.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Retrouvez ICI le lien vers la question sur le site de la Chambre des représentants.